Cahier N7 du FTDES : “ Marginalité sociale, marginalité spatiale : Entre intégration, régulation et mise à l’écart »

Cahier N7 du FTDES : “ Marginalité sociale, marginalité spatiale : Entre intégration, régulation et mise à l’écart »

Coordonnée par Cyrine Khedher

Résumé

La marginalité ne se limite pas à une situation géographique écartée du centre, de la centralité urbaine et des avantages liés essentiellement à une localisation géométrique. Les exclus de la ville sont le plus souvent les défavorisés mis à l’écart des filières de la promotion foncière et de l’accès à la ville .Ils se dirigent vers les filières de la production de l’urbain informel qui se localise essentiellement soit aux seins des périphéries inondables ou dans les zones centrales, péricentrales et aux alentours des sebkhas. La marginalité désigne une situation de mise à l’écart des dynamiques en œuvre d’une ville mais aussi elle est envisagée pour décrire les non-intégrés au sein d’un groupe social du fait des appartenances ethnique, religieuse, raciale et économique.

Marginalité n’est pas un fait qui se réduit à une situation géométrique affichée en terme spatial dans le modèle centre /périphérie là où on considère voire on rejette les activités polluantes et les démunies au sein des zones inondables et marécageuses. Les exclus de la ville qui seront identifiés à travers les études des cas au sein du présent Cahier du FTDES N°7  sont rassemblés au sein des zones enclavées et à l’abri des dynamiques en œuvre.

La marge s’avère une clé de lecture des processus de fabrique de l’urbain et analyseur des modalités des rapports de vivre ensemble et  vivre à la ville. La compréhension des processus constitutifs de la marginalité ainsi que celle de la production du fait urbain nous invitent  à renouveler le regard sur les modalités d’intégration et de régulation afin d’assurer la cohésion sociale, d’instaurer l’urbanisme inclusif et durable.

Les communications du présent cahier portant sur marginalité sociale, marginalité spatiale tout en projetant des alternatifs palliatives afin de réintégrer l’espace et la population au sein des dynamiques centripètes et centrifuges de la ville. Les interventions ne réduisent pas le regard scientifique à des analyses analytiques et/ou descriptives mais plutôt l’incarnent dans une vision croisée entre chercheur et professionnel de l’aménagement. Trois axes structurent le présent numéro émergent portant sur l’analyse des processus constitutifs de la marginalité , lieux et formes des liens sociaux dans les quartiers informels ainsi que les échelles spatiales  de la marginalité .Ces interventions intègrent la population (habitant et usager) autant qu’un acteur qui déploie des stratégies pour :lutter son droit à la ville , participer aux propositions d’aménagement afin d’assurer la cohésion sociale et instaurer un urbanisme inclusif.

Un premier axe met en exergue les marges de la ville et l’action publique : urbain informel et droit à la ville. Les exclus de la ville gagnent leur vie à la marge, sur des terrains marécageux, au sein des zones périphériques mal lotis et se trouvent exposés aux inégalités environnementales (l’étude de cas pratique de Sfax) . De ce fait, la marginalité n’est pas un fait propre à la périphérie ! Elle désigne plutôt une forme de mise à l’écart des aménités urbaines, du droit à la ville et par analogie droit à la vie urbaine. Le deuxième axe porte sur marginalité, discrimination socio –spatiale et mobilité sociale : déliaison sociale . Les formes de la ségrégation se multiplient en fonction de l’appartence raciale et du profil économique de la population .L’accès à l’emploi se trouve régi par les logiques de la discrimination raciale là où les immigrés subsahariens ont moins de difficultés à s’insérer dans le milieu professionnel que les tunisiens mêmes (cas pratique de Bhar Lazrag , commune La Marsa ) . Le binôme lieu de résidence / cursus scolaire sont des facteurs de réussite ou d’échec de l’insertion des écoliers au sein du marché de l’emploi et de la réussite sociale .Par conséquent, la situation sociale ainsi que le lieu de résidence, dictent la trajectoire du cursus scolaire et à travers lui l’accès à l’emploi tout en impactant la carrière professionnelle. Par ailleurs, ces trajectoires freinent toute mobilité sociale possible. Quartier de non droit n’est autre qu’une zone défaillante en termes d’équipements et d’infrastructures, ces contraintes entravent la mobilité sociale de ce segment de la population. L’urbain informel s’avère la clé de compréhension des processus constitutifs de la marginalisation là où se développent l’économie illicite, la drogue et les petits métiers en « noir » . Le dernier axe est relatif à la marginalité socio spatiale : potentialités et disparités régionales (régions de l’intérieur et saharienne). Les régions de l’intérieur à l’échelle du pays se trouvent à l’écart des dynamiques économiques vis-à-vis de l’axe littoral tunisien.  La marginalité régionale selon l’échelle spatiale retenue se creuse davantage manifestée par l’inégal développement. Des contradictions s’affichent : une région de fort potentiel en terme de ressources naturelles n’arrive pas à polariser les territoires proches et lointains de son territoire.

Autres catégories d’acteurs émergent afin de doter la région des investissements pour mener des projets tout en engageant la population autant qu’un acteur pour programmer et changer son cadre de vie (approche participative). La mutation des formes d’agir de l’action publique sont consécutives au contexte du désengagement de l’État qui devient un intermédiaire avec les ONG et les bailleurs de fonds. Des écarts parlant opposent les régions frontalières, situées au sud avec celles du littoral. Une organisation territoriale régie par l’inégal développement place les zones sahariennes et/ou frontalières à l’abandon de l’action publique (Cas pratique de Tataouine). Bien que les patrimoines matériels et immatériels peuvent être envisagés comme un levier de développement économique . Face à une marginalité spatiale, sociale, régionale et professionnelle bien prononcées, des revendications et des fromes de luttes se déclenchent pour l’accès à l’emploi des jeunes citons le mouvement d’« El Kamour » dans la localité de ksar « Ouled Dabbeb ». Autour d’un Ksar, patrimoine mis à l’abri d’une véritable dynamique économique au lieu d’être envisagé comme un levier de développement pour l’insertion des défavorisés et la création des emplois pour la population résidente.

Par ailleurs, marge ne revêt pas les mêmes significations aux seins des différentes disciplines des sciences humaines et sociales .Et, ce qui est qualifié marge socialement n’est pas forcément transcrit spatialement au sein des situations géographiques particulières .Être à la marge c’est plutôt une situation de mise à l’écart. On peut être marginal au centre comme en périphérie, elle n’obéit pas forcément aux logiques du binôme centre/périphérique pour analyser la marginalité.

La ville est coproduite d’en haut (institution) et d’en bas (population) .Il ne fallait pas la limiter à un fait des institutions tout en excluant le citoyen de la phase de proposition des composantes d’aménagements, fait qui a marqué longuement les pratiques urbanistiques à l’échelle du pays. Une focale accordée à l’adoption de l’approche participative et à l’intégration de citoyen pour proposer des remèdes qui lui permettent de défendre son espace de vie et son droit à la ville tout en instaurant les principes de l’urbanisme inclusif et solidaire. L’instauration d’une politique publique plus inclusive de la santé comme un fait social afin de lutter contre les inégalités sociales de santé. L’adoption d’un vison plus inclusive et participative de la part des acteurs, fait qui va aboutir à créer de l’appartenance et de l’ancrage de la population bénéficiaire de ses programmes.

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