Alia AMIMI :
Après avoir réussi à imposer des brevets d’invention sur les produits pharmaceutiques dans le cadre de l’OMC, les pays riches, soucieux de protéger les intérêts économiques de l’industrie pharmaceutique, ont de plus en plus recours aux accords de libre-échange pour imposer des règles de protection encore plus strictes que ce qui est reconnu par l’OMC.
En effet, ces accords comportent des règles sur la propriété intellectuelle pouvant avoir un fort impact sur l’accès aux médicaments en renforçant les monopoles et empêchant la compétition par les génériques sur le marché. Ceci conduit le plus souvent à des prix exorbitants et inaccessibles pour la majorité des pays du Sud.
Ces mêmes accords de libre-échange sont souvent perçus comme étant le principal moyen d’accroître les investissements, d’assurer la création d’emplois, l’accès au marché extérieurs pour les produits locaux mais aussi l’accès à des produits à faible prix pour le consommateur. Ces derniers sont une arme à double tranchant puisque les exigences des pays riches en matière de PI ont un impact inéluctable sur l’accès aux médicaments. Ainsi, au fil du temps, ces dispositions sur la propriété intellectuelle se sont multipliées au sein des accords de libre-échange et sont devenues de plus en plus complexes. C’est le cas aujourd’hui pour les accords ALECA en cours de négociation entre l’UE d’une part et le Maroc et Tunisie d’autre part.
En effet, grâce aux limitation des licences obligatoires aux situations d’urgence nationale, l’interdiction des importations parallèles, l’octroi de brevets sur des modifications mineures sur d’anciennes molécules et nouvelles utilisations, l’extension de la durée de protection par les brevets, exclusivité des données confidentielles et autres… l ‘UE tient à imposer des obligations qui vont au-delà du minimum de protection de la propriété intellectuelle requises par l’ADPIC (L’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce).
Les décideurs politiques, les experts de santé publique, les ONG et associations impliquées dans l’accès aux médicaments ont besoin de pouvoir comprendre et évaluer ces dispositions afin de contenir l’impact sur l’accès aux médicaments et au droit à la santé. Il est donc important, de s’assurer que l’accès aux médicaments, n’est pas entravé par les intérêts commerciaux à travers des clauses qui restreignent la production, l’enregistrement et la disponibilité des médicaments génériques.
Cet atelier vise à sensibiliser tous les acteurs concernés par cette problématique notamment en mettant en avant les clauses « anti-génériques » de l’ALECA qui entravent l’accès au traitement au Maroc et en Tunisie afin d’informer sur le danger que peut représenter un ALE afin de pouvoir assurer plus de transparence dans les négociations des clauses liées à la santé.